Les extensions internet : d’où viennent-elles, à quoi servent-elles et comment sont-elles utilisées ?
.com, .fr, .eu ou même .shop ou .tv : ces quelques lettres qui viennent après le point dans une adresse internet ont un sens et une histoire. Au départ liées à un pays ou à une zone géographique, à un type d’activité ou d’organisation, les extensions connaissent aujourd’hui des usages et significations multiples. Retour sur la genèse de ces piliers du web, sur leur utilisation actuelle, et sur leur réglementation.
Une extension internet : qu’est-ce que c’est ?
Vous le savez, chaque site internet possède une adresse (ou URL – Uniform Resource Locator) qui permet de s’y connecter. Cette adresse est unique, et permet lorsqu’on la tape dans la barre de son navigateur d’arriver directement sur le site que l’on recherche. En pratique, les adresses web se terminent par un point, suivi de quelques lettres (ou parfois aujourd’hui d’un mot complet) : c’est cette dernière partie que l’on appelle communément l’extension de domaine.
Cette extension, ou « domaine de premier niveau » selon l’appellation technique (« top-level domain » ou TLD en anglais), est choisie par le créateur du site lors de l’enregistrement de son adresse web. Elle permet de diffuser un message sur l’ensemble de la stratégie numérique d’une entreprise ou d’un particulier. On peut ainsi préférer enregistrer une adresse avec une extension .fr si le site renvoie à une activité exercée en France ou cible le public français, .br si l’activité est localisée au Brésil, .tv pour des activités liées à la télévision (même si cette extension cache quelques surprises !) ou encore .aero si l’on est un acteur de l’aéronautique. Une extension est donc un élément clé pour présenter une spécificité et une identité particulières, et dans certains cas le nom de domaine devient un espace de « co-branding » entre le titulaire dont la marque figure à gauche du « . » et l’extension qui convoie son propre message.
Toutes ces extensions sont régulées au niveau international par l’ICANN (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers), qui est une organisation à but non lucratif.
D’où viennent les différentes extensions ?
Aux origines d’internet, des chiffres et seulement des chiffres !
Dans les années 1970, lorsque se déploie le réseau internet, les contenus sont encore peu nombreux. Surtout, ils sont créés et utilisés par des professionnels, souvent familiers du monde informatique et qui s’accommodent d’adresses IP composées uniquement d’une suite de chiffres séparés par des points. C’est en 1985, pour faciliter les usages et la navigation face au développement exponentiel des contenus, que ces chiffres sont mis en correspondance avec les adresses en toutes lettres que nous connaissons aujourd’hui.
Pour spécifier les types d’usages et d’acteurs, les premières extensions génériques naissent. Le .com désigne au départ les activités commerciales, le .org les organisations à but non lucratif, et le .net (pour « network ») les fournisseurs de services liés au réseau. Aux États-Unis, les utilisateurs précoces d’internet que sont les milieux militaires et académiques, ont droit respectivement au .mil et au .edu – extension autrefois ouverte à toutes les institutions éducatives mondiales avant d’être réservés aux États-Unis au début des années 2000.
L’arrivée des extensions nationales
Ce n’est pourtant qu’en 1991 que le « World Wide Web » naît et s’ouvre au grand public, notamment grâce au physicien et informaticien Tim-Berners-Lee. À partir de là, les usages d’internet vont s’ouvrir et se diversifier, les utilisateurs et les enregistrements de noms de domaine vont se multiplier, tout comme le nombre d’extensions ouvertes par l’ICANN.
De plus, s’il a d’abord été essentiellement utilisé aux États-Unis, internet est dorénavant un réseau mondial. Il devient alors important de distinguer les acteurs et les activités selon les pays au-delà des extensions génériques telles que .com, .org, .net ou encore .info. En 1985, les extensions nationales sont donc créées et gagnent vite en popularité afin qu’un maximum de pays puissent disposer de leur propre identité numérique. Les extensions nationales sont aussi une occasion pour les entreprises de mettre en avant la dimension communautaire et locale de leur positionnement, au sein de leur pays, mais aussi de favoriser le rayonnement du tissu économique national et l’encadrement des lois sur le numérique.
Le .fr, un exemple d’extension nationale
Le .fr est un élément essentiel pour les entreprises françaises, qu’il s’agisse de revendiquer leur appartenance nationale, le Made in France et donc la qualité de leur offre, de marquer l’ancrage territorial de leur activité et donc leur proximité vis-à-vis des clients français, ou encore de poser un encadrement juridique régi par les lois françaises et européennes. Désormais distribué par plus de 300 bureaux d’enregistrement, le .fr est une extension peu onéreuse, très populaire et qui concurrence de plus en plus le .com sur le territoire français. En effet, 91% de TPE/PME françaises considèrent qu’une adresse en .fr est un gage de confiance.
Depuis 1997, c’est l’Afnic, l’Association Française pour le Nommage Internet en Coopération, qui assure la gestion du registre des noms de domaine en France (plus de 4 millions de noms de domaine en .fr à ce jour), en lien avec l’ensemble de l’écosystème de l’internet en France.
Différents types d’extensions, pour des usages variés… voire inattendus !
Il existe aujourd’hui plus de 1 500 extensions différentes pour les adresses internet. Si toutes ont une signification de départ, certaines ont toutefois pu voir ce sens et cet usage d’origine détournés, notamment les extensions nationales de premier niveau.
Les extensions les plus populaires
On l’a mentionné, les extensions les plus connues et historiquement les plus utilisées sont les premières à avoir vu le jour. Le .com par exemple est longtemps resté le mètre étalon de la présence en ligne pour les entreprises, puisqu’il désignait historiquement les activités commerciales. Il s’est toutefois largement émancipé de ce sens premier pour devenir l’extension de référence dans la culture populaire, et une extension à caractère globale, mais aujourd’hui largement concurrencé par certaines extensions nationales (comme le .fr en France) dont les attributs font plus de sens pour les professionnels et les particuliers. À ses côtés, les deux autres extensions historiques que sont le .net (infrastructures réseau) et le .org (organisations non lucratives) restent très présentes.
Quelques exemples d’extensions nationales
Les extensions nationales, liées spécifiquement à un pays, sont désormais très développées : il en existe plus de 200, toujours composées de deux lettres. On parle de domaines de premier niveau géographique, ou « country code Top-Level Domains » (ccTLDs). On peut citer notamment :
- .fr : France
- .us : États-Unis
- .uk : Royaume-Uni
- .de : Allemagne (Deutschland)
- .cn : Chine
- .jp : Japon
- .ca : Canada
- .br : Brésil
- .ru : Russie
- .in : Inde
- .au : Australie
- .es : Espagne
- .it : Italie
- .za : Afrique du Sud
- .mx : Mexique
- etc.
Parmi ces extensions nationales, un certain nombre ont toutefois vu leur usage détourné pour tout autre chose que l’identification d’un pays. En voici quelques exemples :
- .tv : créée pour les îles Tuvalu, cette extension est aujourd’hui fréquemment utilisée pour les sites liés à la télévision, ou à la vidéo en général.
- .io : créée pour le Territoire britannique de l’océan Indien, cette extension est essentiellement utilisée par des startups et des projets liés aux nouvelles technologies, les lettres « io » étant associées à « input/output » en informatique.
- .co : créée pour la Colombie, cette extension fait aussi penser à « company » ou « corporation », ce qui lui vaut une grande popularité auprès des entreprises qui cherchent une alternative au .com, lorsqu’il est déjà utilisé par un autre acteur.
Dès lors, si vous utilisez le .tv pour un projet visuel ou le .io pour votre start-up, il est important de vous rappeler leurs origines et donc les réglementations qui leur sont associées. Vous serez dépendant à 100% de la charte de nommage et donc de la politique de registre des îles Tuvalu ou du Territoire britannique de l’océan Indien !
De nouvelles extensions génériques pour de nouveaux enjeux
Le monde des noms de domaine évolue rapidement et ne cesse d’innover, s’adaptant aux usages numériques émergents et offrant des opportunités uniques pour les entreprises, les institutions et les individus. En effet, de nombreuses nouvelles extensions ont vu le jour depuis 2012 pour spécifier encore davantage les activités, et répondre à de nouvelles problématiques et besoins.
On peut penser aux extensions liées à des activités spécifiques qui permettent de renforcer l’identité numérique des entreprises ou encore de certains projets, comme :
- .lol ou .fun, pour des sites autour du divertissement,
- .shop pour les boutiques en ligne,
- .fashion pour le secteur de la mode,
- .immo pour l’immobilier,
- etc.
D’autres extensions génériques apparaissent également de façon encore plus ciblée, comme :
- Les extensions de marque (également appelées .marque, brandTLD ou .brand). Ces extensions, créées par des entreprises pour regrouper leurs différents sites sous une même identité, marquent une avancée majeure en matière de souveraineté numérique et de démarcation stratégique. En effet, les entreprises ont un contrôle total sur leur extension, réduisant les risques de cybersquatting, typosquatting, fishing ou encore leurs coûts de surveillance. En plus de booster leur stratégie numérique, ces extensions personnalisées renforcent également leur posture de référence dans leur domaine d’activité ainsi que leur caractère d’innovation. À titre d’exemple, on peut citer le .leclerc pour E.Leclerc dans la grande distribution ou le .mma pour le groupe d’assurance mutualiste du même nom MMA. En 2023, il existe 504 extensions en .marque dans le monde.
- Les extensions .[ville] ou .[région], aussi appelées geoTLDs, comme .paris pour la ville de Paris, .nyc pour New York, ou encore .bzh (Breizh) pour la Bretagne. Ces extensions permettent de mettre en lumière une zone géographique tout en favorisant le référencement local des utilisateurs. Elles renforcent le lien entre les acteurs locaux et leur public cible et valorisent ainsi le tissu économique et communautaire d’une zone géographique donnée. En 2023, il existe 61 extensions géographiques dans le monde.
En 2012, l’ICANN a donc permis la création de nouvelles extensions se référant à des marques, des communautés, des activités, des villes ou à des activités. Une nouvelle vague d’ouverture est prévue pour 2026, et pourra permettre à de nouveaux acteurs de proposer et de créer leur extension personnalisée.
Enfin, des extensions considérées comme « alternatives » ont vu le jour pour répondre aux besoins des secteurs émergents comme la blockchain : .crypto, .eth, .bit, .coin, .nft. Ces extensions ne sont aujourd’hui pas intégrées au registre standard des noms de domaine (DNS) et ne peuvent être traitées que par certains navigateurs compatibles tels que Brave ou Opera. Elles ne peuvent donc pas être considérées comme des extensions de domaine en tant que telles.
Réglementation et gestion : des extensions en évolution permanente
Quelles politiques de nommage liées aux extensions ?
Une politique de nommage définit les règles et conditions d’attribution des noms de domaine sous une extension donnée. Ces règles varient selon les extensions et sont établies par les registres : les organisations responsables de la gestion technique et administrative d’une extension.
Quelques exemples de critères des politiques de nommage :
- Géographique : certaines extensions, comme .fr, nécessitent que l’activité ou le titulaire du domaine ait un lien avec le territoire lié à l’extension (pour le .fr, il faut que les titulaires soient situés dans un pays appartenant à l’Union européenne). Comme nous l’avons vu, tous les territoires n’ont pas cette même règle : l’extension en .tv peut être utilisée pour d’autres objectifs que celui prévu à l’origine car il n’y a pas d’obligation à être ancré sur le territoire associé, ici les îles Tuvalu.
- Spécifique : des extensions comme .gov (gouvernement) ou .aero (industrie aéronautique) sont réservées à des secteurs spécifiques.
- Liberté d’usage : d’autres, comme .com, sont largement ouvertes et accessibles à tous sans critères particuliers.
- Contraintes techniques : la longueur des noms, les caractères acceptés (lettres accentuées, alphabets non latins), et la structure des noms de domaine sont également définis par ces politiques. En outre, alors que les noms de domaine n’acceptaient initialement que les lettres de l’alphabet latin, les règles ont depuis été assouplies. Elles permettent notamment pour certaines extensions d’utiliser des caractères accentués ou issus d’autres alphabets ou d’autres systèmes d’écriture (alphabet cyrillique, sinogrammes pour les langues chinoises…).
Ces politiques de nommage permettent ainsi de :
- Assurer que chaque extension est utilisée conformément à ses règles et objectifs
- Encourager la préservation d’une identité numérique, parfois locale, et promouvoir les acteurs nationaux
- Limiter les risques d’enregistrement abusif de noms de domaine selon des procédures et des règles spécifiques
- Faciliter le référencement selon la géographie des activités
- Encadrer les coûts
Les extensions de domaine : ces lettres qui constituent un pilier d’internet
Les extensions internet constituent ainsi l’un des piliers d’internet. Comme nous l’avons vu, elles ne sont pas de simples lettres ou mots ajoutés à la fin d’une adresse web, mais des éléments stratégiques qui permettent d’identifier, de localiser et de valoriser une activité ou une organisation ; elles apportent un message complémentaire permettant de mettre en lumière le titulaire et de le distinguer de ses homonymes. Leur diversité reflète l’évolution constante d’internet et s’adapte aux nouveaux besoins des organisations, des particuliers mais aussi des territoires.
À l’ère du numérique, où l’identité en ligne est devenue incontournable, choisir une extension de domaine pertinente est essentiel pour renforcer sa visibilité, sa crédibilité et sa stratégie de communication !
En combinant innovation, réglementation et flexibilité, les extensions de domaine continueront à évoluer pour répondre aux défis numériques de demain.
Article rédigé par les experts du .fr