Le dropshipping, arnaque ou opportunité ?
Vous avez entendu parler du dropshipping et vous songez à vous lancer ? Attention à bien considérer les risques que présente cette activité, trop souvent présentée, de façon trompeuse, comme la garantie d’un business facile et juteux. La réalité est moins reluisante et demande à la fois des compétences, des investissements, et de bons fournisseurs. Voici ce que vous devez savoir sur ce modèle économique rarement vertueux, y compris au niveau écologique et social.
Qu’est-ce que le dropshipping et comment ça marche ?
Littéralement, si vous faites du dropshipping, vous choisissez de « drop » (abandonner) le « shipping » (la livraison). Vous vendez un produit qui ne vous appartient pas : c’est votre fournisseur qui s’occupe de la production, du stock ou de la logistique.
Concrètement, vous ne faites que commercialiser et marketer les articles via votre site, puis vous passez commande à votre fournisseur, qui se charge de l’expédition. Dans ces conditions, vous êtes un intermédiaire et votre profit repose sur la marge que vous faites entre le prix auquel vous vendez le produit à vos acheteurs et celui auquel vous l’obtenez auprès de votre fournisseur.
Le dropshipping est-il légal ?
Oui, le dropshipping est tout à fait légal. Reste que, comme toute activité commerciale, il est soumis au Code du commerce et aux lois françaises en la matière. Vous devez respecter le droit de rétraction de vos clients, être attentif au paiement des droits de douane, ainsi qu’à celui de la TVA si vos produits sont importés. Vous devez également obtenir les autorisations de vente nécessaires lorsque vous commercialisez les produits d’autres marques, vous assurer que ceux-ci ne soient pas contrefaits, et bien sûr ne pas faire de publicité mensongère.
Un rappel à la loi nécessaire car, dans la pratique, le dropshipping est un univers très concurrentiel, où il est souvent difficile d’émerger lorsqu’on se lance. Nombre de revendeurs ont ainsi tendance à prendre des raccourcis pour rentabiliser leur activité. Au détriment non seulement des consommateurs, mais aussi de leur propre réputation, qui peut être sévèrement entachée en cas de condamnation.
Les pièges du dropshipping
Aucune maîtrise des produits et de leur livraison
Ne pas avoir à s’occuper de la production, du stock ou de la logistique peut sembler confortable et idéal pour lancer son premier business sur internet. Toutefois, cela vous place dans une situation de très forte dépendance vis-à-vis de vos fournisseurs, puisque vous n’avez aucun contrôle sur les produits. Changement de prix, stock indisponible… vous êtes soumis à de nombreux aléas, qui peuvent se répercuter sur vos clients et, à terme, sur votre réputation.
Un produit livré non conforme
Certains dropshippers, qui se fient aveuglément à la description produit donnée par leurs fournisseurs, ne savent même pas vraiment ce qu’ils vendent à leurs clients. Les retours peuvent alors être désastreux si la qualité n’est pas au rendez-vous ou si le produit a été survendu dans l’espoir de séduire un maximum d’acheteurs. C’est contre vous que se retourneront les clients en colère, y compris via des commentaires négatifs qui peuvent impacter durablement votre e-réputation.
S’il est recommandé de tester vous-même chaque produit avant de le commercialiser et d’en faire l’éloge, rien ne vous garantit pour autant que votre fournisseur enverra bien le même article à vos clients par la suite. Au-delà du risque de vous retrouver face à un fournisseur malhonnête, il arrive que certains soient pris de court par la demande et, n’ayant pas suffisamment de stock, remplacent sans vous avertir le produit original par un autre plus ou moins similaire.
Un prix qui évolue entre l’achat et la revente
De la même manière, puisque vous vendez des produits avant de passer vous-même commande à votre fournisseur, il peut arriver que celui-ci ait décidé entre-temps d’augmenter ses prix. Une mauvaise surprise qui viendra réduire d’autant votre marge finale, si elle ne vous rend pas tout simplement déficitaire sur l’opération.
Enfin, n’oubliez pas que la livraison engendre des frais de port et, selon le territoire, des frais de douane. Ces derniers peuvent varier grandement, et il peut arriver qu’ils s’avèrent si importants qu’ils dépassent la marge que vous aviez initialement prévue… vous rendant là aussi déficitaire sur votre vente.
Un modèle rarement rentable et à l’éthique douteuse
La tentation des prix bas et des fausses promotions
Le premier levier utilisé par les dropshippers pour se démarquer de leurs concurrents est celui du prix. Si cela peut être efficace pour attirer de nouveaux clients, le risque de faire plonger votre rentabilité est grand. Vous risquez de ne plus pouvoir assumer vos coûts (hébergement de votre site, frais de transaction, publicité et marketing, temps investi au détriment d’autres activités…) et de ne pas récupérer le revenu prévu.
Imaginez une paire de baskets vendue 40 euros par votre fournisseur, et proposée à 45 euros par vos concurrents en ligne. Cela représente une marge de 12,5 % qu’ils peuvent assumer car ils sont bien implantés et vendent de grandes quantités. Si vous choisissez de vous démarquer de façon agressive en la vendant 42 euros, pour que des clients qui ne vous connaissent pas choisissent malgré tout de les acheter chez vous, vous baissez cette marge à 5 %. Sachant que les plateformes e-commerce prennent facilement 2 % de frais sur vos transactions, cela ne vous laisse que 3 % de marge… sans compter vos autres coûts. Il va donc vous falloir réaliser énormément de ventes pour être vraiment rentable.
La tentation de faire des fausses promotions est souvent grande, par exemple pour faire croire au consommateur qu’il s’agit d’une opportunité à saisir et déclencher des ventes. Pire, certains dropshippers n’hésitent pas à tromper leurs clients sur le prix original de l’article, en affichant un prix barré bien plus élevé pour faire croire à une bonne affaire, tout en espérant que les internautes n’aillent pas vérifier ailleurs. Outre l’aspect moral plus que douteux de ces pratiques, elles sont interdites par la loi.
Le piège de la publicité et du marketing d’influence
Un autre moyen pour tenter d’émerger et de faire décoller vos ventes consiste à investir dans des campagnes publicitaires en ligne, sur les réseaux sociaux ou sur internet. Si vous n’avez pas les compétences nécessaires, vous allez devoir faire appel à un ou des professionnels spécialisés. Puis il vous faudra acheter auprès des plateformes des espaces publicitaires, ce qui peut vite coûter cher si vous voulez avoir une présence importante auprès de vos cibles. Là encore, la rentabilité de votre investissement n’est pas garantie.
Pour être visibles, certains dropshippers préfèrent miser sur le marketing d’influence. Dans ce cas, il vous faut trouver un accord financier pour qu’un ou plusieurs « influenceurs » de votre choix, qui ont généralement derrière eux une communauté correspondant à vos cibles, fassent la promotion des produits que vous commercialisez et incitent à aller les acheter sur votre site.
Toutefois, cela peut vous coûter très cher… sans compter que ces opérations commerciales ont largement défrayé la chronique ces dernières années, avec des discours et des pratiques souvent trompeuses, illégales et condamnées par la justice. Pensez à consulter le guide des droits et devoirs des influenceurs du Ministère de l’Économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, qui explique notamment comment signaler les pratiques ne respectant pas le droit des consommateurs.
Un impact social et environnemental bien réel
Le plus souvent, vos fournisseurs seront des plateformes et des entreprises étrangères qui, pour être compétitives et produire à bas coût, ont des pratiques désastreuses au niveau du droit du travail et/ou du respect de l’environnement. Souhaitez-vous tirer profit de ce type de commerce ?
L’autre question à se poser est celle de la surconsommation. Le dropshipping est préjudiciable à l’environnement, car il incite à produire toujours plus, et pour cela à consommer beaucoup d’énergie (souvent via des combustibles fossiles qui contribuent au dérèglement climatique) et à épuiser les ressources naturelles. En tant que dropshippeur, vous êtes un commerçant qui se rémunère sur la marge effectuée sur chaque achat, aussi votre intérêt est de vendre le plus possible. Là encore, souhaitez-vous tirer profit de ce type de commerce ?
En conclusion, le dropshipping est une activité qui n’enrichit souvent que ses promoteurs. Contrairement à ce qu’ils vous font miroiter, cela demande généralement beaucoup d’efforts et d’investissements financiers avant de devenir rentable. Il faut également bâtir une relation solide avec des fournisseurs dont la fiabilité n’a rien d’évident. Sans compter que les plateformes en ligne, qui vous incitent elles aussi à vous lancer, prennent souvent des frais importants, face auxquels une présence en ligne indépendante et maîtrisée est toujours préférable.
